Portrait / Portrait 2020

Club des Duadistes, le portrait du mois : Jean-Marc Quarin

Le DUAD est un prestigieux diplôme reconnu par le monde du vin en France et à l’étranger. Qui sont les membres du réseau formé par les Duadistes ? Chaque mois le DUAD’s club présente une ou un ancien Duadiste.

Critique indépendant, créateur de la méthode de dégustation « La Bouche avant le Nez » et auteur d’un guide des vins de Bordeaux, Jean-Marc Quarin est de la promotion 1985.

DECEMBRE  2020

JM QUARIN

Son parcours

Né en 1955 dans l’AOC Châteauneuf du Pape, Jean-Marc Quarin obtient le DUAD avec mention en 1985. Dans la foulée, il fait un stage de vinification du millésime 1985 au Domaine de Chevalier à Léognan et participe aux dégustations d’assemblage du 1984 en présence d’Emile Peynaud.

En 1989, Jean-Marc Quarin termine une licence de Sciences de l’éducation par un mémoire de recherche sur la pédagogie de l’enseignement de la dégustation. Pour exercer, il crée Bordeaux Quintessence qui postulait la présence d’un patrimoine du goût du vin à Bordeaux à identifier et à transmettre. De cette recherche est né un travail plus critique jusqu’à la publication de son guide des vins de Bordeaux (Edition Solar) en 2011. Ce dernier développe sa nouvelle méthode dégustation : « La Bouche avant le Nez ». Ce livre reçoit le prix Nadine de Rothschild avec cette mention : “au nom du jury je voudrais souligner l’extrême intelligence de l’introduction, cinquante pages qui resteront dans l’histoire de la connaissance des vins de Bordeaux”.

Jean-Marc Quarin crée le concept d’Outsider, ces vins dont “le goût est supérieur à ce que l’étiquette laisse paraître”. Salué par la presse et le monde du vin pour ses talents de dégustateur indépendant, il lance en 2013 le Salon des Outsiders à Paris et en 2016 les Rencontres Jean-Marc Quarin de Lausanne à propos “des Bordeaux qui réenchantent le goût du vin”.
Depuis 2018, sa base de données sur www.quarin.com permet aux abonnés d’accéder à 40 000 commentaires sur les vins de Bordeaux

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Pourquoi avoir choisi de passer le DUAD ?

C’est une démarche progressive. Mes premiers cours de dégustation datent de 1981 à l’hôtel des vins avec Franck Dubourdieu. Une expérience d’une semaine extraordinaire. A partir de là le désir de connaissance n’a fait que grandir. J’avais un autre métier. Peu à peu je me suis rapproché de la fac à travers des modules de formation continue, puis enfin le DUAD en 1984-1985. C’était une passion d’amateur pour le plaisir de comprendre un monde qui touchait ma famille puisque mes grands-parents étaient vignerons dans le Cabardès.

Que vous a apporté le diplôme ?

Pour moi ça a été une ouverture expérimentale riche sur le monde du vin, en particulier celui de Bordeaux, avec ses réussites et ses faiblesses. Paradoxalement, ce n’est pas là que j’ai appris ce qu’était un vin rouge mal fait. Il ne peut pas se résumer à un vin à défaut, pour lequel le DUAD est très formateur. Le DUAD a été pour moi une étape utile pour définir plus tard les frontières entre un vin mal fait, bien fait, puis parmi les vins rouges bien faits, la reconnaissance des plus grands. Une école de dégustation devrait donner un accès immédiat à cette conceptualisation.

Quel est le meilleur souvenir que vous gardez de cette année de formation ?

Avec quelques membres nous avions fait un groupe de dégustations appelé “les pépins” pour déguster encore plus de vins en affichant notre identité d’étudiants duadistes. Je me souviens d’un superbe voyage en Bourgogne. Bref, nous profitions à 200 % de ce que nous apprenions. Il faut se rappeler que nous étions au temps de la création du premier Vinexpo, de l’arrivée sur le marché du millésime 1982 dont certains dégustateurs pensaient qu’il était inférieur au 1981 et même au 1980, des débuts de la vente en primeur aux particuliers…

Et le pire souvenir ?

J’enregistrais tous les cours théoriques avec un walkman Sony. La batterie s’est arrêtée… angoisse et frustration ! Les cours étaient denses, je préférais les réécouter.

Y a-t-il un cours ou une dégustation qui vous a marquée en particulier ?

Tous développaient des sujets captivants. Aujourd’hui je garde en tête une phrase “l’hydrolyse enzymatique des hétérosides terpéniques”. Au début, pour un littéraire, ça sonne barbare puis avec le temps presque poétique. Cela devait être un cours de Denis Dubourdieu sur ses recherches du rôle de la levure dans la vinification des vins blancs secs. J’entendais ça comme une aventure vers la découverte de nouveaux horizons gustatifs. Je pense que devant ses découvertes, Denis Dubourdieu a instantanément compris qu’il fallait introduire de la pédagogie pour réussir la transmission d’idées nouvelles. C’est frappant de remarquer dans les interviews des Duadistes publiés, ô combien les étudiants appréciaient sa manière de présenter et développer le sujet. C’était un scientifique doublé d’un littéraire. Emile Peynaud possédait ce don. « Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément. » Nicolas Boileau.

Etes-vous restés en contact avec des Duadistes de votre promotion ?

Plutôt avec les profs ! J’avais demandé à Denis Dubourdieu la possibilité de faire un stage de vinification chez lui. Il m’a redirigé vers le Domaine de Chevalier. C’est pendant via le DUAD que j’ai connu Denis Durantou qui a élevé L’Eglise Clinet, à Pomerol, au niveau que l’on sait. Je n’ai pas cessé de dialoguer avec eux.

 Être Duadiste, pour vous, c’est…

Le DUAD a été pour moi une étape de formation fondamentale, mais pas une fin en soi. J’ai voulu le prolonger par un stage de vinification, puis un développement pédagogique en Sciences de l’Education. Ceci aidant, plus tard, j’ai décidé de faire de la dégustation mon métier. Et je continue. Avec le recul, je trouve que ce diplôme manque de panache dans sa reconnaissance nationale et internationale. Il est en décalage vis-à-vis de la réputation des grands vins du Bordelais qui offrent un trésor de sensations gustatives à ressentir, comprendre et hiérarchiser. Sur ce sujet, j’ai fait ma part de travail en élaborant ma méthode de dégustation, « La Bouche avant le Nez ».

Propos recueillis par Audrey Marret